Conception : Trihn Lo
Réalisation et montage : Cristina Rap
Voix : P. Pivetti et C. Rap
Recorder : C. Rap
Bande-son : T. Lo
Extraits des poèmes Y et “muets, maigres les mouvements” de T. Lo
Durée : 3’59’’
Année : ©janvier 2023
Comment mettre aujourd’hui en jeu l’absence, donner lieu à l’absent, à ses effets de sens, sans céder forcément au risque d’une téléologie de l’inexprimable ; sans risquer de rester ancré à la pensée classique de la mêmeté, réduction-cooptation de l’autre par le même, de l’autre au même ? Comment amoindrir alors la tyrannie de ses dichotomies, désœuvrer les aprioris du négatif de la présence, de l’absence comme négation du visible, sinon par une incessante instabilité, une dialectisation infinie de présence et absence ? Car c’est peut-être là, dans ce battement dialectique du neuter, dans ce ni / ni sans fin, que l’absence ne cesse pas ou n’en finit pas de s’absenter, que ne cesse pas ou n’en finit pas de (se) présentifier (dans) son absentement.
Profondément travaillé par la « taciturnité », par cette « intimité essentielle de la parole avec le silence », dont parle Laurent Jenny, le vidéo-poème Obscure lumière s’inscrit dans une poétique du seuil, de la nocturnité, où chaque élément, réarrangé dans un ensemble composite, concoure à la déperdition de la linéarité : de la mise en voix (en post-production) d’extraits poétiques lacunaires, récités par cœur, à la mise en image, en son et ‘en bruit’.
Par le jeu des transparences et des superpositions, des plans se fondent, se superposent ou disparaissent l’un dans l’autre. Entre ostension et disparition, les images gardent comme quelque chose du fantôme ; elles tirent de ce côté-là ; du côté d’une nuit infinie ; car elles ne sont pas là à compenser l’insuffisance des mots, leur “manque structurel” ; elles gardent leur propre dimension temporelle, une dimension différente de celle auditive-sonore.
C’est, pourtant, au travail d’assemblage en post-production de l’ambiance sonore, auditive et bruissant, que l’instance poétique, la parole récitante et improvisée des voix acousmates, voix-off non localisables, ni-dedans ni-dehors, perd pour ainsi dire sa corporalité sans pour autant être vraiment désincarnée : manifestation d’une incarnation insituable, d’une présence sans corps, la voix habite sans demeurer, elle est de par sa substance physique, charnelle, le lieu d’une dis/apparition tout comme le bruit, trace indocile, signe non domestiqué d’un vivant bruyant.
Cristina Rap et Trihn Lo
Trihn Lo
Poète, artiste sonore, compositrice et improvisatrice, Trihn Lo est chercheuse indépendante. Elle mène actuellement des projets interdisciplinaires dans le champ de la musique acousmatique et électroacoustique, de l’art vidéo, du cinéma intégral et de la musique visuelle. L’exploration des relations entre les sons et les images, capables de produire un rythme audiovisuel asynchrone, dans une approche minimaliste, expérimentale ou d’ordre plus narratif, est aujourd’hui l’un des axes principaux de son travail artistique. Ses pièces musicales ont été présentées à des festivals internationaux de musique acousmatique et expérimentale ou diffusées sur des sites en ligne. Elle a publié aussi des textes poétiques dans des revues francophones et internationales et a participé à un ouvrage collectif paru aux éditions Classiques Garnier.
Pour Esquisses – en mouvement, elle a publié Pas encor(ps) pour la thématique Apparaître et y dans Frontières et limites.
Cristina Rap
Vidéaste, scénographe et illustratrice, Cristina Rap est diplômée de l’Académie des Beaux-Arts. Elle a participé à des festivals internationaux avec des courts-métrages expérimentaux et des vidéos d’animation et a publié sur des revues francophones. En collaboration avec Trihn Lo elle a réalisé, entre autres, les vidéos acousmatiques Hétérotopies (Festival Futura Crest, France, 2019), SIT TIBI TERRA LEVIS (Ciclo des Mujeres Compositoras, Chile, 2019) et Imprésences (Tempo Reale, Firenze, audiovisionielettriche.it, 2021). Son court-métrage Contrappunto, réalisé en hommage à Germaine Dulac pour le Projecte Arxipèlag (Mostra Internacional de Films de Dones), a été présenté en première au Cinéma Zumzeig de Barcelone (2020).
Tout récemment la revue de poésie en ligne “Le Pan poétique des muses” a publié son dernier film d’animation 3D Cauchemar.
Pour Esquisses – en mouvement, elle a déjà contribué à la thématique Apparaître : Cinq autoportraits photographiques -Temps de l’Apparaître.